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[CRITIQUE] The Beast : La bête aime les enfants

The Beast est un thriller qui se déroule dans le milieu de la pédophilie. C’est belge et c’est réalisé par Hans Herbots.

Pour faire plaisir à Jacques Toubon et pour bien nous rappeler que la France est un pays francophone, le titre original « De behandeling » (le traitement) a été traduit en français par « The Beast » (la bête). Un choix de titre parfaitement absurde, et pas uniquement parce qu’il attribue un titre anglophone à un long métrage Belge.

The Beast c’est l’histoire de Nick Cafmeyer, un flic hanté par la disparition de son petit frère lorsqu’ils étaient encore gamins. Depuis qu’il a été innocenté, l’un des suspects de l’affaire ne cesse de le narguer.
Puis un jour, une affaire étrangement similaire lui tombe sur les épaules. Comme tout bon flic de polar, Nick va prendre l’affaire à titre personnel. De fausses pistes en découvertes macabres, The Beast, c’est l’histoire d’une vie pleine de démons et de colère étouffée.

Horreur graduée

Dans le genre des thrillers cruels et poisseux à la 8mm, ou Se7en, le film de Hans Herbots se pose là. Sans jamais ciller, The Beast déroule horreurs après horreurs, comme s’il s’amusait à tester la résistance de son héro désabusé. Le film ne recule devant rien et s’enfonce en spirale dans les bas fonds poisseux d’un milieu pédophile où évoluent des monstres aux pathologies variables. Plus l’enquête avance, plus les environnements se font poisseux, les victimes suspectes et les suspects dégoûtants. Même les fausses pistes, code indispensable du genre, semblent graduées : plus Nick Cafmeyer fouille, plus les immondices refoulent à la surface.

Cette montée exponentielle de l’horreur humaine fait son petit effet – peut-être un brin putassier – et tel un torture porn réaliste, capitalise sur l’abominable. Sans évoquer l’infâme (laid et débilitant) A Serbian Film, The Beast se situe à la croisée des genres : servant clairement les codes du thriller, tout en les épiçant de la surenchère d’immonde et de cruauté propre au torture porn. Pour autant, le film de Hans Herbots ne montre pas tant la débauche qu’il ne l’évoque. Au lieu de montrer sang et viscères au spectateur, Hans Herbots, le travaille en profondeur, s’insinue sous la peau à force de l’exposer à l’ignominie. Mieux, The Beast se contente parfois d’évoquer des déviances, sans jamais les clarifier, leur laissant le temps de faire leur chemin dans la tête du spectateur jusqu’à ce qu’elles trouvent écho en un autre élément. Et là, on en frissonne de dégoût.

Image froide

De la même façon, The Beast n’emprunte pas son imagerie au torture porn, rejetant en bloc les filtres instagram et l’esthétique de vidéo musicale. Tant dans son traitement visuel que dans son personnage, le thriller belge rappelle les exceptionnelles séries Wallander et Sebastian Bergman, avec leurs flics suédois désabusés, brisés et affecté à des affaires toutes plus sordides les unes que les autres. Mais ce ne sont pas tant les enquêtes qui passionnent, que leurs effets révélateurs sur l’enquêteur : elles dévoilent l’humanité et les failles qu’ils peinent à cacher.

En sus, elles jouent sur des esthétiques froides, renforçant le point de vue pessimiste du « héro ». The Beast joue sur l’exact même tableau, poussant le vice jusqu’à comprimer ses plans. Le héro est souvent filmé en gros plan et les objets collés en bord de cadre, provoquant une impression d’écrasement. L’effet est assez saisissant et saisit bien souvent à la gorge.

Cette réalisation doublée de couleurs hivernales, accentue le ton dépressif du métrage et de ses protagonistes. Nick Cafmeyer nage dans ses fantômes et semble enquêter pour lui plus que pour les victimes directes.

Finition insatisfaisante

Malheureusement, The Beast s’étend, il multiplie les fausses pistes pour flouer le spectateur mais finit par l’y perdre. Rétrospectivement, certaines pistes explorées, certains éléments évoqués me semblent ne pas avoir d’autre logique que celle de déstabiliser le spectateur. Sans être rédhibitoires, elles nuisent donc à la cohérence de l’histoire.

La fin, étrange dans sa dualité, en laissera certains sur le carreau. Et ne pas hameçonner le spectateur avec un final qui met tout le monde d’accord, cela ne pourra que desservir le film.

Enfin, le montage est parfois carrément désagréable. Une scène en particulier, souffre d’un inutile sur découpage : une scène de recherche de données dans le commissariat. Les coupes accrochent l’œil et tiennent le spectateur hors de la scène.

Au final, The Beast est un thriller qui ose et qui poisse, mais qui pêche par un manque de finition. A moins que vous n’ayez une obsession maladive de l’image et des codes du genre, The Beast saura tout de même vous charmer par ses qualités – notamment par son approche graduée tout en tension – et vous saurez en excuser les quelques défauts.

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Colin
Colin
Chroniqueur graphique névrosé, passionné de cinéma de bourrinage vidéo-ludique et de Russ Meyer.

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