Tale of Tales (le Conte des Contes) est le nouveau film de Matteo Garrone (réalisateur de Gomorra), tiré de l’ouvrage du même nom écrit par Giambattista Basile. Pour d’évidentes raisons de durée, le métrage choisit de se focaliser sur trois des cinquante contes présents dans l’ouvrage original.
Dans trois royaumes se déroulent donc trois drames desquels pourront être tirés trois morales.
Une reine stérile désire plus que tout un enfant. Mais le désir ardent de créer la vie nécessite quelques sacrifices.
La fille d’un souverain trop protecteur souhaite par dessus tout découvrir le monde et l’amour. Emportez par la fougue, le souhait brûlant de la jeune fille se réalise d’une triste manière.
Deux teinturières flétries et abîmées par les produits qu’elles manipulent vont accidentellement attirer l’attention d’un roi particulièrement chaud de la bite. Un conte sur le jeunisme et l’obsession de beauté.
Matteo Garrone, vraisemblablement stimulé par un matériau original d’une qualité incroyable, se précipite à corps perdu dans Tale of Tales et fait un premier choix des plus contestables : tourner en langue anglaise pour rendre le film accessible au plus grand nombre. Au cachot les prouesses de langue de Giambattista Basile (l’ouvrage est écrit en napolitain).
Puis lui vint une idée : filmer des contes d’une manière réaliste. Il dénude donc ses trois contes sont d’artifices, de féerie et de grandiloquence « […] afin que le spectateur puisse à chaque instant se sentir partie prenante du récit. » Raté. C’est l’effet inverse qui se produit. Les personnages semblent abandonnés dans des décors étriqués, désertés par la vie. Les monarques règnent sur des pierres grises et froides comme leurs sujets. Une poignante sensation de « fin de règne » habite tous les contes.
Cet aspect « réaliste » confère en effet à Tale of Tales une sécheresse visuelle et une sensation d’économie peu compatible avec Le Conte. L’univers semble avoir été dépouillé de son essence même, ne laissant qu’une coquille vide. Conscient des limites de son ambition, le cinéaste y superpose quelques codes de l’horreur (du gore, de longs plans pesants). Cela laisse paraître le potentiel de son intention : lorsque la fable se vautre dans la lie, que le réalisateur va chercher la fange et le vice.
Malheureusement, le plus souvent la caméra se tient à distance, ne faisant qu’accroître la froideur du rendu. Peut-être Matteo Garrone a-t-il confondu « réalisme » et « austérité » – ce qui ne sera pas pour déplaire à certains, j’en suis sûr.
Enfin, vint le temps du montage. Au lieu de raconter les trois histoires bout à bout, Tales of Tales les éclate et redistribue la donne, pour traîner le spectateur d’un récit à l’autre. Ce procédé fait naître une attente pour un final dantesque où se croiseraient les trois histoires.
Que dalle !
En revanche, entre chaque segment vous aurez le droit à un lent fondu au noir suivit d’une ouverture brutale sur un plan très lumineux. Dans une salle obscure, la répétition de cette transition est fort désagréable.
Au bout de 2h15, le spectateur que je suis est ressorti de la projection avec une sensation mitigée. Sans être ennuyant, le film est décevant. Les partis pris ne sont pas suffisamment poussés pour donner à Tale of Tales la froide cruauté que la carte « conte réaliste » semblait pourtant appeler.
Par contre, ne boudons pas notre plaisir, ce n’est pas tous les jours que l’on voit Vincent Cassel à poil derrière un rideau de velours rouge hurler à ses gardes de défenestrer une vieille dame.
NOTE : pour l’occasion, un « tweet dont vous êtes le héro » est disponible sur le compte https://twitter.com/Contedes_contes/.
Réalisé par Matteo Garrone, Tale of Tales est attendu dans les salles pour le 1er Juillet 2015 prochain avec Vincent Cassel, Salma Hayek, John C. Reilly et Toby Jones.
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