Sea Fog : Face à la médiocrité ambiante du cinéma, il existe (entre autre) deux solutions. Ne plus aller au cinéma ou mettre ses préjugés au fond de la cuvette des toilettes et aller voir tout et n’importe quoi en toute innocence.
J’ai opté pour la seconde solution. C’est donc sans aucune idée de ce qu’est Sea Fog que j’ai abordé le film. Première surprise : le film est coréen. Deuxième surprise : il est excellent. Troisième surprise : c’est le premier film du réalisateur. Décidément, le cinéma coréen pète la forme.
Un drame social qui n’en est pas vraiment un
Si la structure du film est des plus classique (trois actes avec une crise au milieu), la façon de la présenter l’est un peu moins. En effet la première moitié du film est une véritable chronique sociale sur la condition des pêcheurs coréens face à la crise économique asiatique à la fin des années 1990.
Sea Fog suit donc Cheol-joo, capitaine d’un chalutier à l’article du naufrage et d’un équipage nécessiteux. Le rafiot tombe en ruine et la pêche n’est pas bonne.
Les détails sur la situation économique et sur le mode de vie des pêcheurs abondent. Leur activité est menacée car considérée comme peu rentable, chacun vit grevé de dettes et dans une apparente pauvreté. Pourtant aucun n’envisage faire autre chose. La mer c’est leur vie.
Refusant d’abandonner son navire contre une prime à la casse, Cheol-joo va accepter de se lancer dans les traversée illégales. Mais au lieu de la marchandise de contrebande qu’il attendait, il devra faire entrer des clandestins Sino-Coréen en Corée.
Pêche, Famille, Survie
L’aspect social se serait probablement suffit à lui même. Sung-bo Shim dont c’est le premier film, capture tout le drame de ces pêcheurs déchirés par la crise et profondément touchés par la détresse des clandestins qu’ils transportent. Sans jamais verser dans le putassier, la réalisation impressionne par sa justesse. Chaque plan est précis, magnifiquement composé et raconte les protagonistes du film. Rien n’est gratuit.
Puis soudain, changement de cap brutal : le chalutier se transforme en un décor de désolation où va se dérouler un cruel survival.
Derrière ce retournement de situation inattendu, il y a un scénariste : Bong Joon-ho, scénariste et réalisateur des excellents Mother et Snow Piercer. L’auteur a déjà prouvé son intérêt pour les cellules familiales qui implosent pour transformer le familier en menaçant. Sea Fog s’inscrit donc fort logiquement dans ce schéma : l’équipage du chalutier, véritable famille d’infortune, doit faire face à une crise qui pousse chacun de ses membres dans ses derniers retranchements.
Huis clos dans la brume
Au moment même où s’opère le retournement de situation, la brume se lève piégeant le navire dans un tombeau ouaté. Immédiatement, le film devient un huis clos fantasmagorique. Au delà de la brume, plus rien n’existe. Ainsi toute l’attention de l’équipage (et du spectateur) est concentrée sur les événements qui vont se dérouler sur le vieux rafiot. Un procédé d’une efficacité suffocante.
Alors, oui, il faut aller voir Sea Fog et se laisser submerger par cette histoire racontée avec brio.
Réalisé par Sung Bo Shim, SEA FOG – Les Clandestins est prévu dans les salles pour le 1er avril 2015 avec Yun-seok Kim, Park Yu-chun, Han Ye-Ri, Seong-kun Mun, Sang-ho Kim, Hee-jun Lee, Seung-mok Yoo et In-gi Jung.
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