Laissons les tendances de côté et intéressons-nous à l’originalité. Avec Adopte un Créatif, vous allez découvrir des passionnés, des créatifs, des youtubeurs / youtubeuses méconnu(e)s qui font l’actualité du web. Pour ce nouveau numéro, je suis parti à la rencontre de Raphaëlle et de son podcast ‘L’Hymne à la Daube’.
Il y a quelques mois, j’ai découvert sur twitter un teasing au sujet d’un nouveau podcast. Baptisé ‘L’Hymne à La Daube’ le concept se veut original, à chaque épisode un(e) invité(e) chanteur(se) analyse une chanson ‘daubesque’ qui leur est chère. Un podcast qui aspire à l’abolition de l’idée de bons et mauvais goûts musicaux. Après plusieurs numéros, j’ai souhaité en apprendre plus sur la créatrice à l’origine de ce nouveau rendez-vous. Des Beatles aux Jonas Brothers, découvrez l’univers de Raphaëlle.
Bonjour Raphaëlle, merci de participer à notre chronique ‘Adopte un Créatif’. Dans le cas où il y aurait des internautes ignorant ton actualité peux-tu te présenter et nous rappeler ton parcours ?
Raphaëlle : Salut ! Alors je m’appelle Raphaëlle, et je suis en fait assez nouvelle dans le monde du journalisme culturel. J’ai obtenu ma licence de Philosophie à La Sorbonne et j’ai eu l’occasion d’enseigner l’anglais, le français et la philo à plusieurs reprises, dans des cadres différents. Je me destinais en fait à devenir professeure de français en Angleterre jusqu’en 2019, parce que je tenais absolument à retourner vivre dans ce pays, pour lequel je voue un amour sans limite depuis que j’ai 14 ans, et dans lequel j’ai eu la chance de passer un an et demi. Ayant complètement raté les études de FLE qui auraient pu me permettre de réaliser ce rêve, ma famille, mes amis, toutes les personnes bienveillantes qui me suivent de près, m’ont fait comprendre que c’était peut-être un signe pour me mettre à travailler dans ce qui me plaisait réellement : la musique.
J’ai toujours aimé écrire, et c’est vrai que depuis l’enfance, j’écoute de la musique en permanence, et c’est la seule chose dont je sais à peu près parler. Je me suis alors tournée vers un ami, JD Beauvallet, co-fondateur des Inrocks, qui m’a grandement encouragée dans cette voie, et qui m’a vraiment donné envie de me lâcher un peu, de m’écouter, et d’admettre que c’était une chose qui m’avait toujours attirée. Par chance, peu de temps après, Les Inrocks ont posté une annonce de recherche de stagiaire au sein de leur équipe (fin 2019), et j’ai sauté sur l’occasion.
Je m’estime très chanceuse d’avoir été prise parce que j’ai le souvenir d’avoir dit n’importe quoi lors de mon entretien ! Ils ont décidé de croire en moi, j’imagine, et je leur suis très redevable. J’y ai fait six mois absolument géniaux, lors desquels je me sentais bien plus à l’aise que pendant mes études de FLE. J’y faisais des news, sorties de clip, parfois quelques papiers un peu longs, dont un paru dans la version papier (consécration pour une stagiaire ! C’était le numéro de Leïla Slimani, dans lequel j’avais assuré la rubrique Médias, en parlant de l’émission de Jehnny Beth sur Arte.), et des interviews d’artistes.
Malheureusement, le Covid-19 est arrivé vers la fin de mon stage, en 2020, et il a bien fallu que je ‘m’occupe’ en attendant le retour à la vie normale. J’ai donc proposé des piges à General Pop, pour qui je travaille encore très occasionnellement, et surtout, j’ai monté ce podcast vers la fin de l’année.
Quelle est ta toute première expérience avec internet ?
Raphaëlle : Je pense que comme beaucoup de personnes de mon âge (je suis née en 1995), mes premiers souvenirs d’Internet remontent aux vidéos de Mozinor sur Dailymotion. On regardait ça en boucle avec mon frère, ma sœur et mes cousins, et on se marrait tellement. Et puis ‘Le grand détournement‘ est devenu un classique rapidement, ainsi que ces vidéos cultes qui sont devenues des memes classiques, comme ‘Chocolate Rain’ ou ‘Leave Britney Alone’. Good times.
Présente-nous ton univers :
Raphaëlle : J’ai sorti un épisode 0 en prévision de ce qui allait suivre pour expliquer le concept de L’Hymne à La Daube. Tout est né de cette chanson, ‘Sucker‘ par les Jonas Brothers, qui est un coup de cœur que j’ai eu en 2019. Au même titre que lorsque j’ai découvert ‘Happiness is a Warm Gun‘ des Beatles quand j’étais adolescente, je n’en revenais pas de tomber en amour pour de la musique à ce point. Et ça m’a pris beaucoup de temps d’accepter qu’entre un groupe que j’ai longtemps moqué (les Jonas Brothers) et un groupe qui m’a conditionnée dans ma passion pour la musique en général et à qui je dois à peu près tout (les Beatles), j’avais pu ressentir, le temps d’un titre seulement, la même chose.
Je trouvais ça fou, et j’ai fini par douter de mon bon goût, puisque j’ai toujours pensé, et je le pense encore, que les Jonas Brothers ne font, à mon sens, pas de la ‘bonne’ musique. Cependant, voilà, Sucker a fini par devenir la chanson que j’ai le plus écoutée sur Spotify depuis que j’ai l’appli (la chanson est sortie en 2019, j’ai Spotify depuis 2016…) Et je me suis penchée sur ce phénomène et me suis dit que ce que me faisait ressentir cette chanson devait être, malgré moi, bien réel.
Même si objectivement, je sais que ce n’est pas ce que je qualifierais en temps normal de bonne musique. Mais j’ai tellement de choses à dire, tellement de choses que j’éprouve, par rapport à cette chanson. Alors j’ai voulu lui rendre hommage, parce qu’elle est boudée par mes ami.es quand je la propose en soirée/dans la voiture, alors qu’elle m’est très chère.
J’ai réfléchi quelques jours à comment je pourrais rendre cet amour visible, et je me suis rendu compte que les artistes avaient aussi des ‘daubes’ chéries, comme tout le monde, je suppose. Mais j’ai voulu mêler ce que je savais faire, le format d’interview en tant que journaliste, à une vraie discussion autour de ce phénomène d’amour réel pour quelque chose de pas terrible. J’en ai parlé autour de moi, on m’a beaucoup encouragée, alors je me suis lancée.
Le format écrit ne m’intéressait pas trop pour ce projet, et on m’a toujours dit que j’avais une voix de messagerie vocale (on en tire les conclusions qu’on veut), et je me suis dit : pourquoi pas. Pour ce qui est du nom de L’Hymne à La Daube, je voulais quelque chose qui évoque bien l’idée de ‘célébration’ d’un truc ‘pas terrible’. Si en plus ça pouvait faire écho directement à des titres de chanson (là, j’ai de la chance, on a ‘L’Hymne à l’Amour‘ et ‘L’Hymne à la Joie‘ à la fois !), c’était encore mieux !
J’aime penser que le titre est assez parlant en soi et qu’il est drôle.
Les Beatles ont complètement changé ma vie.
Qu’est ce qui t’a donné ta vocation ?
Raphaëlle : Je crois que je n’ai pas suffisamment confiance en moi pour attester que je suis vraiment forte quand il s’agit de parler de musique, mais je peux affirmer sans crainte que c’est ce que je préfère faire. Cependant, sans la bienveillance et les conseils de mes proches, je crois que je n’aurais jamais osé franchir le pas du revers de situation, pour me consacrer à cette passion plutôt que de suivre le schéma que je m’étais imposé des années durant.
Sans mes ami.es/proches, sans JD, je me serais destinée à cet avenir de professeure et aurais simplement continué à écouter beaucoup de musique. Si on revient vraiment à la racine de tout ça, si on considère que tout remonte à mon amour pour la musique, alors tout a réellement commencé avec les Beatles quand, lors de vacances d’été avec ma meilleure amie, Clara, et ses parents à 12-13 ans, on n’écoutait que ça en voiture.
J’ai développé une vraie addiction pour le groupe. Je les écoutais en m’endormant, je les écoutais dès le réveil, et quand au collège je sentais que c’était possible, je cachais un écouteur dans ma manche, et j’écoutais les Beatles. Aussi bête que ça puisse paraître, sans être jamais allée en Angleterre, c’est eux qui m’ont immédiatement donné envie d’y vivre, parce que j’ai découvert la culture musicale de leur pays, et que je n’ai jamais développé un attrait aussi intense pour autre chose depuis. C’est naïf, c’est irréfléchi, et pourtant, c’est ce qui m’anime encore aujourd’hui.
J’aimais déjà la musique auparavant, j’ai beaucoup écouté Queen et Mylène Farmer notamment, mais je n’éprouvais pas un besoin viscéral d’en parler. Les Beatles ont complètement changé ma vie.
Quelle a été la réaction de tes proches ?
Raphaëlle : Essentiellement beaucoup de soutien, j’ai eu tellement de chance. Beaucoup de gens ont cru en moi à des moments où je ne me sentais pas capable, et vraiment, je leur en suis très reconnaissante. Je me sais très bien entourée.
Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Raphaëlle : Je ne consomme pas vraiment de podcasts, à vrai dire. J’ai écouté quelques épisodes de grands noms, comme Les Couilles sur La Table, La Poudre, quelques épisodes d’A Bientôt de te Revoir, mais même si je trouve que le format de podcast est très important et intéressant, j’en suis quand même restée à un point où, quand j’en commence un, je me dis que je pourrais plutôt être en train d’écouter de la musique.
J’espère que ça me perdra, honnêtement. Il faut soutenir ces projets, et c’est un super concept. Sinon, je dirais… Les Jonas Brothers et les Beatles ! Et ce serait injuste de ma part de ne pas citer Arctic Monkeys, qui est la deuxième grande étape dans ma vie de mélomane : ayant vécu dans le désespoir de ne jamais pouvoir voir les Beatles en concert (et les groupes auxquels je les rattachais, beaucoup d’artistes anglo-saxons des années 60-70), j’étais extrêmement frustrée d’appartenir à une époque qui semblait ne jamais me combler.
Et puis en 2010, j’ai découvert Arctic Monkeys. Si les Beatles m’ont fait comprendre que la musique était quelque chose de crucial pour moi, Arctic Monkeys m’ont montré qu’il y avait énormément de musique qui valait la peine d’être écoutée actuellement. Je ne suis plus du tout dans le regret grâce à eux, et je m’ouvre aux nouveautés avec plaisir.
Quelle est ta première expérience de créatif sur le web ? Comment cela s’est passé ?
Raphaëlle : Encore une fois, comme beaucoup de personnes de mon âge, je crois que je peux admettre que ma première création web, c’était un Skyblog. D’ailleurs, il existe encore, c’est sweetdreams0609.skyrock.com. Je n’ai plus d’accès, j’ai oublié les mots de passe etc., mais il est bel et bien vivant ! Il n’y a dessus plus que les photos de mauvaise qualité de danseuses de flamenco que j’avais vues lors d’un voyage scolaire de 3ème en Andalousie. La photo ‘de profil’ du blog, c’est Paul McCartney en concert, parce que je l’avais vu, l’année d’avant, pour la première fois de ma vie sur scène, et que je ne m’en relevais pas.
Quel a été ton meilleur moment ? Le pire ?
Raphaëlle : Les meilleurs moments s’accumulent, c’est simplement quand un.e artiste me dit oui quand je leur propose de participer. Que des personnes que je connais ou non croient en mon projet et veulent y participer, qu’ils/elles y voient un intérêt, que ça leur donne envie, c’est les meilleurs moments. Peu importent la notoriété, ma relation avec l’artiste. Les réponses positives sont ce qui me touche le plus.
Le pire, je pense que je ne le connais pas encore vraiment, puisque je suis toute nouvelle sur le terrain. Disons que je n’étais pas très contente quand j’ai constaté que la prise de son de Pi Ja Ma (épisode 1) était mauvaise malgré mes nombreuses précautions. Elle était repartie à Avignon où elle habitait à ce moment-là, ce n’était pas possible de recommencer l’épisode, et je tenais tellement à ce qu’il s’était spontanément dit dans la première version, que oui, là, c’était pas super.
Quelles sont, dans tes créations, celles qui te semblent les plus intéressantes, qui te tiennent le plus à cœur, et pourquoi ?
Raphaëlle : Pour ce qui est du podcast, j’ai du mal à avoir le recul nécessaire pour avoir un épisode favori. D’un côté, il y a les artistes qui sont des ami.es que j’aime énormément, et avec qui c’est toujours un plaisir de discuter, et de l’autre, les artistes que j’ai rencontré.es à cette occasion, et qui ont souhaité participer purement parce que le podcast leur plaisait, indépendamment de l’hôte.
Je tiens à tous ces rapports de façon égale. Cependant, dans mon passé de petite journaliste aux Inrocks, je suis particulièrement fière de mon papier sur Working Men’s Club, dans la catégorie ‘Groupe à Suivre’ du magazine, que j’avais rédigé en novembre 2019, très peu de temps après mon entrée dans la rédaction. François (Moreau), mon tuteur et journaliste musical de la rédaction, m’avait très rapidement confié cette interview malgré mon peu d’expérience, et rétrospectivement, ça me touche beaucoup. Parce que WMC est un groupe qui désormais reçoit la reconnaissance qu’il mérite, et que j’adore ce qu’ils font.
Je suis très fière de constater que je fais partie des toutes premières personnes à en avoir parlé, à les avoir introduits en France. Pareil, avoir pu mettre en avant l’émission de Jehnny Beth, que j’admire énormément, c’était une super expérience. Je crois que je ne suis pas peu fière de m’être prouvé que je pouvais établir un rapport avec des personnes que j’admire et dont je salue le travail, à travers mes réflexions et ce que m’évoquait leur musique. Et je me retrouve avec General Pop à interviewer Arlo Parks, Nilüfer Yanya, Flyte, des artistes qui sont soit déjà très intégrés dans l’industrie soit encore peu connus au bataillon.
Et j’aime constater que le stress avant chaque interview est le même, peu importe la notoriété des uns et des autres. J’aime constater qu’avant tout, j’aime la musique de ces artistes, et pas ce qu’ils représentent. C’est pareil pour le podcast.
Quel(s) conseil(s) donnerais-tu aux jeunes créatifs qui souhaitent partager leur univers sur la toile ?
Raphaëlle : DO IT. JUST… DO IT! Non, sérieusement, parlez-en à des personnes bienveillantes qui vous connaissent bien. Évaluez leur réaction, voyez ce qu’ils/elles en pensent. Ce n’est pas leur avis qui est décisif, c’est le vôtre, mais peut-être que leurs conseils sauront mieux vous guider dans une certaine direction. Quoiqu’il en soit, écoutez-vous, et sentez-vous légitimes. Moi-même encore j’ai bien du mal à admettre que je fournis un travail réel – alors que j’y consacre énormément de temps et d’énergie. Faites-le. Vous valez le coup d’essayer.
Si tu pouvais adresser un message à toi-même à l’âge de 10 ans, lequel serait-ce ?
Raphaëlle : Je n’ai honnêtement rien à redire sur ma propre éducation musicale. Je ne peux même pas me conseiller d’écouter plus de musique : c’est impossible. J’écoutais de la musique tout-le-temps. On s’écarte, mais je pense que les messages que je m’adresserais ressortiraient beaucoup plus de l’ordre des combats que je mène aujourd’hui, à savoir le féminisme et la lutte pour la survie des animaux.
Je me dirais d’être cohérente avec ce qui me touche au plus profond de moi-même (savoir très bien que je subis déjà une pression sexiste même à cet âge, et que les animaux que je consomme sont aussi ceux que je serais incapable de tuer moi-même parce que j’ai toujours adoré les animaux). Que ce n’est pas chose facile, que ce sont des combats avec soi-même et les autres, mais qu’en affirmant que certaines de mes pratiques ne concordent pas avec ce que je ressens, c’est là que commencera réellement mon développement personnel.
Non, tu n’as pas besoin de porter une jupe et de te démener pour plaire aux garçons pour exister. Non, tu n’as pas besoin de manger de la viande pour survivre. Oui, tu dois te battre pour te trouver, mais ça vaudra le coup, et tu seras fière de toi.
Que ferais-tu avec un budget digne d’un blockbuster ?
Raphaëlle : Dans un monde sans Covid-19, j’irai à travers le globe pour faire intervenir des artistes internationaux sur L’Hymne à La Daube ! Pour ce qui est du matériel, le podcast n’est vraiment pas la forme de création qui coûte le plus cher, il suffit de deux micros assez lambda et d’un logiciel (moi, je n’utilise que GarageBand, gratuit sur Mac.) En revanche, oui, je vadrouillerais pour enfin transformer L’Hymne à La Daube en Ode To Crap ! D’où mes sous-titres anglais et français sur YouTube, pour rendre le contenu accessible à toutes et tous.
Je fais appel à ton esprit créatif. A toi de nous proposer quelque chose et de commenter.
Raphaëlle : L’autre jour, au téléphone avec Charles-Elie (mon ami qui s’occupe du mastering des épisodes), je gribouillais sur un papier. J’ai toujours, toujours ‘gribouillé’. Je ne suis pas très forte, mais je réfléchis et écoute mieux quand je m’occupe les mains. Je n’ai jamais compris pourquoi ça a résulté en un oignon sympathique, mais j’ai adoré le résultat. Je m’y suis attachée.
Peut-être qu’il y a un lien avec le fait que j’ai récemment expérimenté une multitude de recettes vegan (je suis moi-même végétalienne depuis trois-quatre ans, et végétarienne depuis huit ans), alors que je ne me suis jamais vraiment intéressée à la cuisine. Mais j’ai eu un élan, une envie subite d’essayer, et j’imagine que c’était notamment pour prouver qu’on mange bien, quand on est vegan, et qu’on propose des choses qui sont super bonnes, et surtout : que c’est POSSIBLE ! Ma frénésie s’est un peu calmée, mais je dois la retrouver. Je sais faire une tarte au citron meringuée, un gâteau au chocolat, un gâteau à l’ananas, des madeleines, une tarte aux poireaux, plein de choses, en fait ! Le tout : vegan, dont une tarte aux oignons. D’où ce petit oignon fou-fou et souriant.
Il y a tellement de choses importantes dans la Pop Culture
Tu le sais, notre thématique est la Pop Culture. Que signifie pour toi la culture populaire ?
Raphaëlle : Fatalement, je l’associe à l’art musical, celui qui m’est le plus familier. Le nom qui me vient en premier, c’est Madonna. Je ne crois pas vraiment en ses créations des dernières années, mais jusqu’à Confessions On a Dance Floor (2005), j’enfonce une porte ouverte, mais je la trouve révolutionnaire sur plein de plans. Un talent incroyable.
Je pense que la culture populaire a été détournée pour désigner quelque chose de plutôt négatif, maintenant. C’est comme ça que je l’entends. D’ailleurs, ça rejoint mon idée de L’Hymne à La Daube, quand on pose la question du bon et du mauvais goût : la plupart des daubes dont on me parle font partie de la culture populaire. Je trouve qu’il y a du bon et du mauvais dedans, même si c’est bateau. Mais je refuse qu’on ne lui trouve que de la simplicité, et qu’on lui reproche un manque de subtilité. Il y a tellement de choses importantes dans la Pop Culture. La liste de créations appartenant à la Pop Culture est tellement longue et évidente que je peine même à citer des noms. La Pop Culture est partout, par définition. Me concernant, elle est bienvenue, avec ses défauts et ses qualités, puisqu’elle permet des discussions intéressantes.
Quelles sont tes œuvres de référence dans la Pop Culture ?
Raphaëlle : Je suis extrêmement fan de beaucoup de films, que je peux revoir des milliers de fois, et je ne m’en prive pas. Parmi eux, il y a Jurassic Park (le premier seulement, les suites sont des insultes), la trilogie Retour Vers le Futur, je ne sais pas si Alien fait partie de la Pop Culture, mais j’adore ce film (encore une fois, le premier seulement !) Je suis fan de beaucoup de vieux films Disney (La Belle au Bois Dormant, Peter Pan, Pinocchio,…) et chez Pixar, je pense que Vice Versa m’a bien plus bouleversée que je ne le pense.
Pour la musique, j’ai vraiment du mal, parce que les genres commencent à se brouiller, et ce qui se réclamait indie devient pop dans l’esprit collectif. Par exemple, Tame Impala fait partie de la Pop Culture à mon sens, ainsi que Mac DeMarco. Je les adore. En bandes dessinées, je m’y connais très mal, et je ne sais pas si celles-ci entrent dans la définition qu’on attend, mais j’ai grandi avec Calvin et Hobbes et Gaston Lagaffe. Et je ne m’en lasserai jamais.
Et quelles sont tes attentes ?
Raphaëlle : Je n’attends rien des artistes (musiciens, cinéastes, illustrateurs, etc.) Moi-même, je n’ai pas l’âme d’une créatrice de contenu purement original, puisque mon podcast ne traite que d’œuvres déjà publiées. Je ne sais pas créer, je sais parler de, je sais m’intéresser à. Je ne peux rien attendre, je fais confiance, c’est tout.
Je pense que ça rejoint ce que je disais précédemment, peut-être qu’au-delà de l’essence du contenu, j’attends simplement qu’on considère enfin les femmes comme des êtres humains à part entière dans la culture, qui forge les esprits et les personnalités. Plus de femmes musiciennes mises en avant à des festivals et dans des grandes salles. Plus de rôles féminins avec de fortes psychologies, pas juste des femmes fatales ou des petites choses frêles, mais des personnages qui existent indépendamment des personnages masculins, ou du moins, leur étant égales. Plus de reconnaissances de femmes créatrices de bandes dessinées, etc. Je ne connais (et apprécie beaucoup) que Pénélope Bagieu, du moins c’est le seul nom qui me vient. La faute me revient aussi parce qu’il suffirait que je m’ouvre un peu plus à cet art, mais il faudrait aussi que l’on sache me donner envie de le faire.
Un mot sur ton actualité ? Tes projets en cours ?
Raphaëlle : Tout se déroule comme prévu. La suite dans la durée dépend essentiellement du virus, parce que j’ai des artistes britanniques à faire intervenir sur L’Hymne à La Daube. J’aimerais vraiment faire les entretiens face à face et pas à distance, je tiens beaucoup à la proximité que deux interlocuteurs doivent avoir quand on traite de l’intimité. Donc voilà, cet été, j’espère, le podcast sera officiellement bilingue.
A quel autre créatif souhaiterais-tu voir poser ces questions ?
Raphaëlle : Sans hésiter, Pi Ja Ma ! C’est l’invitée de mon premier épisode. Elle touche à tout, la musique, le dessin, et récemment, elle a tourné dans un court-métrage. Elle a une super culture, elle est très curieuse et elle me fait pleurer de rire.
Dans ton entourage, il y a une autre créatrice de contenus, Judith de la chaîne Demoiselles d’Horreur. C’est pourquoi je suis obligé de te poser cette question ‘Quel est ton film d’horreur préféré ?’ (Rires).
Raphaëlle : Mon film d’horreur préféré, c’est mon film préféré tout court. Judith et moi avons grandi en regardant beaucoup de films ensemble (je précise qu’elle est ma grande sœur, au cas où.) Elle s’y connaît bien mieux que moi, mais on a globalement les mêmes références, et j’aime beaucoup regarder des films d’horreur aussi.
En vacances dans un manoir au Portugal, à 14 ans, ma meilleure amie Clara, Judith et moi, avons regardé Shining. C’était la première fois pour moi. Au même titre que ‘Sucker‘ ou ‘Happiness is a Warm Gun‘, je suis tombée en amour pour ce film, ainsi que pour Kubrick en général, dont l’œuvre m’émeut plus que n’importe quel autre réalisateur. J’ai regardé Shining tous les jours pendant un petit temps (on dirait les origines d’une future serial killeuse…), et je l’avais même installé sur mon premier iPod. Lors d’un long voyage en car avec mon collège, je l’avais regardé deux fois sur sont tout petit écran, parce que je ne m’en lassais simplement pas. Je ne vois pas de défauts à ce film. Mais comme Judith, je suis dingue du Dracula de Coppola, de Sleepy Hollow de Burton, de The Others d’Alejandro Amenabar,…
Lorsque tu as lancé L’Hymne à La Daube, la chaîne YouTube de Judith existait déjà depuis quelques mois. Est-ce qu’il y a eu des discussions entre vous au sujet de la stratégie à adopter pour le lancement du podcast ?
Raphaëlle : A bien y réfléchir, pas vraiment. On est très proches, elle et moi, on se comprend pas mal sur beaucoup de points, mais son format et son sujet de prédilection sont quand même assez éloignés du mien. Le mien repose sur un rapport avec un ou des interlocuteurs, je m’efface pas mal, j’écoute les gens parler et j’essaie de pousser une réflexion à partir d’eux, mais Judith meuble seule ses propres analyses. Le tout, sur des œuvres qu’elle estime être relativement bonnes, tandis que le principe de ma création repose sur le soi-disant ‘mauvais goût’.
Elle m’a cependant énormément encouragée, elle consomme mon podcast et le suit de près, et elle me fait des retours, comme je le fais avec ses vidéos. J’aime beaucoup son contenu et je trouve qu’elle apporte vraiment quelque chose d’essentiel dans son domaine. Je ne veux pas trop m’avancer, mais j’ai cru comprendre qu’elle appréciait aussi mon travail. On ne se conseille pas trop sur le fond, chacune respecte le domaine de travail de l’autre, mais on se serre les coudes. Mais ça reste ma puante de sœur et il est hors de question que j’admette un jour que je l’aime, beurk.
As-tu beaucoup de retours des personnes qui te suivent ?
Raphaëlle : J’en ai beaucoup, proportionnellement au petit nombre de personnes qui me suivent ! Je n’ai pas une énorme communauté, en revanche, celle que j’ai est fantastique. Les retours sont exclusivement bons (bon, ça, ça ne détermine pas la qualité de mes auditeurs et auditrices), mais ce qu’il en est dit me touche beaucoup. Ce sont des personnes qui comprennent bien la portée du propos, et qui savent bien formuler ce qui leur touche.
Je suis contente aussi de constater que ça peut un peu ‘débloquer’ des personnes qui ont ‘honte’ de certains de leurs goûts. En tout cas, si mes auditeurs et auditrices lisent ces lignes, je vous suis très reconnaissante et vous remercie beaucoup pour vos retours, plus que pour vos partages, même s’ils sont très précieux. Savoir ce que vous pensez, les conclusions que vous tirez des épisodes, c’est ce qui me prouve que ce que je fais n’est pas en vain. Merci.
Tes abonné(e)s te soufflent des idées parfois ?
Raphaëlle : On me souffle des idées d’invité.es à accueillir, oui ! Sachez d’ailleurs que la majorité de vos désirs sont des ordres. A suivre.
Que voudrais-tu dire à tous tes abonné(e)s et aux prochains ?
Raphaëlle : L’un des principaux buts de ce podcast reste l’invitation à découvrir des artistes. Certains sont déjà connus, mais d’autres sont encore neufs dans le paysage musical, et je tiens vraiment à ce que mon émission permette d’éveiller la curiosité du public. Je n’invite que des personnes dont j’apprécie le travail, et j’estime que tous méritent une reconnaissance. Ne vous ruez pas que sur les artistes que vous connaissez déjà ! Apprenez à connaître le travail de chacun d’entre eux, laissez-vous surprendre ! Et aussi : bienvenue à toutes et tous !
Pour terminer, quelle question aurais-tu souhaité que l’on te pose et qu’aurais-tu répondu ?
Raphaëlle : J’aurais aimé qu’on me demande combien de baleines bleues faudrait-il superposer sur la longueur (de tête à queue) pour atteindre la hauteur de la Tour Montparnasse. La réponse est 7 baleines bleues. Superposez sept baleines bleues bout à bout le long de la Tour Montparnasse, et vous verrez. Essayez, ça vaut le coup.
Encore une fois merci Raphaëlle d’avoir participé à Adopte un Créatif.
Raphaëlle : Merci à vous pour votre initiative de donner un peu de visibilité à un projet naissant et indépendant ! C’est super.
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Propos recueillis par Thomas O. pour Eklecty-City.fr, qui remercie Raphaëlle de s’être prêtée au jeu d’une interview.