Les comédiens de doublage se mobilisent contre l’usage grandissant de l’IA dans leur secteur, menaçant leur métier et l’exception culturelle du doublage.
Depuis plusieurs mois, l’industrie du cinéma et du doublage est confrontée à une évolution technologique majeure avec l’arrivée de l’intelligence artificielle. Les comédiens de doublage, tout comme d’autres professionnels de l’audiovisuel, s’inquiètent de la dévalorisation de leur travail, voire de la disparition de leur rôle face à des machines capables d’imiter les voix humaines sans consentement.
Une situation qui est loin d’être unique à la France, car l’inquiétude s’étend à l’international, avec des exemples tels que celui de Scarlett Johansson, qui a dû mener une action en justice pour défendre son droit à l’utilisation de sa voix. Face à cette menace, les comédiens de doublage français, appuyés par des associations comme le Syndicat Français des Artistes (SFA), ont lancé plusieurs initiatives pour protéger leur métier, notamment une pétition demandant au gouvernement de défendre l’exception culturelle du doublage en France.
Les comédiens de doublage manifestent contre l’IA
Le 3 décembre 2024, cette mobilisation a pris une ampleur importante avec une manifestation organisée à Paris. Des centaines de comédiens de doublage, accompagnés d’auteurs, traducteurs et techniciens, se sont rassemblés sur la place Diaghilev pour protester contre l’utilisation non régulée de l’IA dans le doublage. Le slogan phare de la manifestation, ‘Touche pas à ma VF !‘, soulignait l’importance de préserver l’âme du doublage français face à la machine. Les participants, soutenus par des syndicats comme la CGT Spectacle et la CFDT-Snapac, ont exprimé leurs craintes concernant l’effacement progressif des voix humaines au profit de technologies de clonage vocal.
Les revendications des manifestants sont claires : l’IA doit exister, mais dans un cadre législatif strict. Un des principaux objectifs de la grève était de sensibiliser les plateformes de streaming, telles que Netflix et Disney+, à l’importance de ne pas exploiter les voix des comédiens sans leur consentement. Selon les syndicats, aucun contrat actuel ne prévoit de clause sur l’exploitation future de la voix des artistes par l’IA, laissant la porte ouverte à des pratiques dangereuses et illégales. L’un des exemples marquants est l’outil ElevenLabs, permettant à quiconque de cloner la voix d’un individu sans autorisation préalable.
L’inquiétude ne touche pas uniquement les comédiens de doublage, mais aussi d’autres secteurs de l’audiovisuel, comme les traducteurs et adaptateurs. L’IA impacte déjà lourdement des métiers tels que le sous-titrage ou l’audiodescription, menaçant jusqu’à 15 000 emplois dans l’industrie. Face à l’essor inexorable de l’IA, les syndicats appellent à la mise en place d’une législation spécifique pour encadrer l’utilisation de cette technologie, afin de préserver non seulement les droits des comédiens, mais aussi l’intégrité de l’industrie du doublage dans son ensemble.
Le mouvement continue de croître et, même si certains craignent un manque de soutien du gouvernement, les syndicats et les associations prévoient de nouvelles actions pour défendre les droits des artistes. Les prochaines étapes de ce combat incluent la présentation de contre-propositions aux plateformes de streaming, avec l’espoir de parvenir à un compromis avant la fin de l’année.